Voici une déclaration qui ne peut que convenir aux adhérents et sympathisants de Plein Jour.
Et voici donc un nouveau partenaire dans la lutte contre le célibat imposé aux prêtres de l’Eglise Catholique Romaine ! Nous ne pouvons que nous en réjouir !
Déclaration au sujet de la pédophilie dans l’Église – Réseau de la Conférence des baptisé-e-s (CCBF)
Devant la persistance et l’aggravation considérable des dénonciations par la justice civile d’actes de pédophilie dans l’Église catholique, devant l’appel du pape François à toutes les communautés catholiques, la CCBF entend prendre sa part, à la fois dans la solidarité envers les victimes et dans la vigilance contre une culture de mort qui abuse du corps d’autrui.
Elle fait sienne la vigoureuse dénonciation du cléricalisme faite par le pape François. Sans nier la profonde solidarité entre laïcs et prêtres que le jeûne et la prière peuvent insuffler, elle demande que l’Église prenne des dispositions concrètes pour aller jusqu’à la racine de ce cléricalisme qui est, pour l’Église et pour la société toute entière, un poison.
Il est urgent de ne plus fermer les yeux sur les conditions objectives qui le favorisent : célibat obligatoire, absence de femmes dans les instances de décisions, anthropologie qui méconnaît la fonction structurante de la sexualité dans le psychisme d’un être humain et se fonde sur « ce qui serait ‘naturel’, un concept qui n’existe pas, abus spirituels et emprise psychique sur des religieux, religieuses et simples fidèles, terrible culture de l’entre soi – entretenue dans les séminaires – qui définit un sérail et des gens qui lui resteront extérieurs, concentration inacceptable de toutes les décisions de l’Église – qui concernent pourtant tous les fidèles – dans les mains d’une petite caste de personnes qui se protègent les unes et les autres en toute impunité.
Car c’est masqué et pavé de bonnes intentions que le cléricalisme opère, non seulement en matière de mœurs, mais dans une manière d’être, dans un discours pervers qui instrumentalise le divin, maquille le pouvoir en « service », et infantilise le peuple catholique. Il est temps de se souvenir de l’adage « qui veut faire l’ange fait la bête. »
La CCBF observe ces jours-ci des manœuvres latérales pour minimiser ces faits, pour les imputer à un autre temps où la société n’avait pas sur ces sujets la clairvoyance actuelle, pour relativiser la notion d’attouchement, pour dire qu’une fois, c’est bien peu… et pour déplorer la médiatisation de ces « affaires ». Ces procédés sont scandaleux. Derrière, il y a un concept qui fait flores, celui de la « raison d’Église » qui veut que sous le couvert de la sainte obéissance, on minimise, on dissimule, on prétende régler « en interne » le problème, loin des micros et des caméras et pire encore, en faisant obstruction à la justice civile.
La CCBF réaffirme avec force que la justice civile doit être le premier interlocuteur de l’Église : curie, évêques et supérieurs majeurs des congrégations religieuses doivent lui communiquer toutes les informations utiles. Aussi elle demande que le pape ordonne aux intéressés d’aller systématiquement déclarer aux instances civiles les faits commis sur des mineurs. Trop souvent, dans l’Église, on croit que la justice de Dieu dépasse la justice des hommes ; mais l’une ne va pas sans l’autre. Ces dérives pathétiques, outre les effets pervers qu’elles ont sur le corps de l’Église, lui font perdre, en France en particulier, toute crédibilité en matière éthique.
Elles conduisent la CCBF à demander l’ouverture d’assises sur la gouvernance de l’Église de France. Nous croyants, sommes impliqués, nolens volens, dans ce discrédit qui nous atteint individuellement et collectivement. Nous ne pouvons croire qu’il s’agit d’exceptions. Ces événements sont la conséquence d’un mode de gestion qui a failli et qui doit être repensé avec les laics. Il faut oser faire confiance au peuple de Dieu, à son « sensus fidei », pensé en lien avec le magistère, bien sûr, ce « sens de la foi » unanimement reconnu, mais scandaleusement inutilisé. Il ne manque pas de forces, dans le monde catholique, pour donner de leurs compétences, de leur expérience et de leur foi au service d’une Église attentive aux appels de l’Évangile. « Le baptême précède et dépasse l’ordination » dit le pape François. Écoutons les baptisés et entrons délibérément dans un nouvel âge de notre Église.
Le 22 août 2018
Le bureau