Le pape François a bien du mal à apporter des réponses aux très nombreux problèmes qu’il a trouvés en arrivant : mise en ordre de la Banque du Vatican (IOR-Institut des œuvres de religion), Pédophilie de prêtres dans nombre de pays, Rapport sur l’inspection des couvents de religieuses américaines, Synode sur la famille, nominations de nouveaux cardinaux pris dans de nouveaux pays et plus orientés dans le sens de ses orientations personnelles, accueil des divorcés remariés et des homosexuels, refonte de la Curie romaine… sans parler des problèmes du monde particulièrement brûlants : migrations des pays d’Afrique ou du Moyen Orient vers l’Europe, mais aussi guerre ou chaos dans bien des pays de la Libye à la Syrie, en passant par le Yemen et l’Ukraine, Inégalités riches-pauvres…
Pourtant au milieu de cette vigilance tous azimuts, une rencontre a particulièrement attiré l’attention. Le 10 février 2015, lors d’une messe célébrée à Rome à la Maison Sainte Marthe où il loge, le pape François avait invité des prêtres qui entendaient fêter leurs 50 ans de prêtrise mais aussi, et voilà la surprise, cinq prêtres mariés depuis et donc privés de ministère dans l’église catholique romaine.
Cf. L’article du Journal Le Point http://www.lepoint.fr/societe/des-hommes-maries-bientot-pretres-19-02-2015-1906425_23.php
L’article indique que le pape avait invité : « … cinq anciens prêtres qui avaient abandonné leur ministère pour se marier ». Allez savoir ! L’avaient-ils réellement « abandonné » ou en avaient-ils été privés par décision épiscopale ? les journalistes ne sont jamais très au clair dans ces domaines, un peu compliqués, il est vrai.
Quelques jours plus tard, un théologien bien connu en Italie, Don Giovanni Cereti, lui avait fait remarquer, à l’occasion de sa rencontre avec le clergé de Rome, la distorsion entre le comportement des églises orientales qui ont des prêtres mariés et celui de l’église romaine qui les refuse. Il faut dire que ce théologien se bat depuis longtemps pour la réadmission des prêtres mariés dans des ministères.
Il raconte lui-même, avec un joli brin de malice, ce que le pape lui a répondu : » Io sono un po’ sordo eh? magari ho capito male, ma mi pare che Papa Francesco abbia proprio detto: Il problema dei preti sposati è presente nella mia agenda… Importante, no? » « Je suis un peu sourd, eh ! Peut-être ai-je mal compris, mais il me semble que le pape François a dit en termes propres : le problème des prêtres mariés est présent dans mon agenda… C’est important, non ? »
Ce n’est pas la première fois qu’il se prononce sur cette question. Dans une interview publiée en 2014 dans le journal italien La Repubblica, il avait déjà évoqué qu’il cherchait « des solutions » concernant le célibat des prêtres.
Le même théologien italien ne cesse de répéter : »Non chiamateli spretati, si resta preti in eterno ! » Ne les appelez pas défroqués; ils restent prêtres pour l’éternité. » Le Pape lui-même aurait donc utilisé les termes « prêtres mariés – preti sposati ».
Pourtant dans l’article mis en lien, le journal Le Point ne manque pas de titrer sous l’image du pape : « François a prononcé sa petite phrase en présence de prêtres défroqués en raison de leur mariage. » Mais, Monsieur, ne savez-vous pas que tous les prêtres catholiques sont défroqués aujourd’hui, à part les intégristes ou les trop conservateurs ! Le « froc », c’est ainsi qu’on appelait la soutane, pour les distinguer des laïcs ! Et c’est Jean XXIII qui a autorisé les prêtres à la quitter, avant même le Concile Vatican 2 ! Moi qui pensais que cette appellation qui sue la réprobation et la méchanceté avait complètement disparu des mémoires !
Don Giovani, bien entendu, utilise les termes de « i preti sposati » les prêtres mariés. Ce sont d’ailleurs les termes utilisés dans le titre même de l’Association « Fédération européenne des prêtres mariés » (1). Et le théologien d’ajouter dans son argumentation auprès du pape : » Ce sont des personnes préparées et sérieuses. »
C’est quoi un « agenda » ? Littéralement, traduction du latin, il s’agit « des choses à faire ». Oui, à faire, mais le pape ne dit pas quand ce sera fait, quand la règle sera modifiée, évidemment ! Pourtant, dans l’usage, le mot Agenda est devenu synonyme de « Calendrier » !
Le geste du pape, très concret celui-là et à la symbolique forte, n’est-il pas plutôt d’avoir invité à Sainte Marthe pour prier avec lui des prêtres mariés ? Un geste important, ne serait-ce qu’au plan humain et fraternel. Nombre de cardinaux et d’évêques ont dû apprécier, eux qui mettaient à la porte tout prêtre venu leur annoncer sa fréquentation d’une possible épouse : « Partez le plus vite possible et le plus loin possible. A partir d’aujourd’hui, je vous retire tout ministère. » Combien l’ont entendu cette parole fraternelle ?!
Le même engouement s’était emparé du milieu médiatique lorsque Mgr Parolin, qui allait par la suite devenir Secrétaire d’Etat (traduisons premier ministre, en quelque sorte), avait affirmé à un journal du Venezuela: » Non, le célibat des prêtres n’est pas un dogme de l’Église et il peut être discuté parce que c’est une tradition ecclésiastique. « (2) Nous le savions bien et depuis longtemps ! Mais peut-être pas les journalistes !
Plein Jour avait alors reçu quantité de demandes d’interview pendant cette période d’effervescence médiatique.
Plein Jour a encore de beaux jours à guerroyer !
Jean
(1) Site FEPCM : http:// www.pretresmaries.eu/
(2) http://www.pretresmaries.eu/pdf/fr/453-Communique_Parolin.fr.pdf